C’est dans La Voix du
Nord d’aujourd’hui dimanche 1er mars 2015, rubrique : « De
vous à nous » qu’un lecteur s’élève contre ce procédé.
Ce sale œil de Moscou…
La gendarmerie organise des réunions publiques
d’échanges avec les mairies dont le conseil municipal a déjà fait savoir son
intention d’adhérer à ce dispositif. De plus, la salle est, elle aussi, acquise
à la cause. Il ne se trouve que deux ou trois hurluberlus qui osent parler des droits de l’homme.
Rappelons que la sécurité des personnes et des
biens est une mission de l’État. Et
qu’il est tout de même étrange pour cela de faire appel à des personnes non qualifiées ni même compétentes.
Ne fait-on pas là un pas dans la société de suspicion ? Ne fait-on pas
dans la dérive sécuritaire, quand la gendarmerie, jouant sur la peur, vient
susciter l’engagement des habitants ?
N’y a-t-il pas quelque chose de malsain dans cette précipitation pour
venir remplir un bulletin de candidature ? D’autant que de vraies
questions se posent. Comment et par qui ces personnes seront-elles choisies ?
Petit historique : Inspirés des politiques
anglo-saxonnes (« neighborough watch »), les « voisins vigilants » sont un
programme initié par l’ancien ministre de l’Intérieur Claude Guéant (sous l’UMP
Nicolas Sarkozy) et continué par Manuel Valls (socialiste ?). C’est dans
les communes rurales ou dans les zones pavillonnaires, où le taux de personnes
âgées et de vote Front National sont élevés, que sont mis en place de telles
pratiques. Sur les territoires de gendarmerie, les maires peuvent créer des
réseaux de « voisins vigilants », qui comprennent des correspondants de rue et
des coordinateurs. Ce sont souvent des personnes inactives en journées, des
retraités, qui souhaitent « protéger » leurs voisins des cambriolages et
violences en toutes sortes. Dès qu’ils suspectent un fait étrange - une voiture
qui repasse plusieurs fois dans la même rue, des démarcheurs un peu trop
insistants ou même se rendent compte de flagrants délits -, les correspondants
de rue alertent les coordinateurs, qui eux-mêmes appellent la gendarmerie.
Un manuel proposé par la mairie PS de
Villemoustaussou (Aude) indique les bons gestes : il faut connaître ses
voisins, ne pas intervenir en cas de flagrants délits, signifier l’apparence
des suspects (vêtements, couleur de peau, etc…) ou noter les plaques
d’immatriculation des voitures. Les quartiers où existe un tel dispositif sont
indiqués à leur entrée par un panneau : fond jaune, œil grand ouvert,
terrifiant mélange de Loft Story et 1984 ! On vous regarde, on vous surveille,
alors pas de comportements suspects !
L’efficacité du programme reste à prouver : si le sentiment d’insécurité baisse, les
gendarmes concèdent que rien n’indique une réduction des actes de délinquance
et des cambriolages.
Pire, ce
programme est un réel aveu d’échec de la politique de sécurité de Sarkozy puis
de Valls ! La réduction des effectifs de police et de gendarmerie est la cause
réelle des « voisins vigilants » ! Au point que certains volontaires
bénéficieront du statut, et l’expression est parlante, de « collaborateur occasionnel du service
public (collabo) » prévu dans la loi
Loppsi de mars 2011 et recevront en conséquence des indemnités ! Des fonctionnaires délateurs quoi ! Ça ne
vous rappelle pas une triste période de notre histoire ?
La circulaire Guéant et le manuel sont pétris de
bons sentiments, d’appels à la
solidarité, la fraternité, au combat contre l’individualisme. On appelle
même ça la « participation citoyenne
» ! Ou comment dire quelque chose en le
nommant par son contraire… On se moque de nous ! « La participation
citoyenne » est une expression utilisée
aussi pour faire semblant de donner la parole aux citoyens alors que
l’on n’en tient nullement compte !!! (Voir les réunions du genre
Créa’active aux Augustins à Hazebrouck etc.)
Surveiller
son voisin et être prêt dénoncer n’importe quelle personne qu’on juge suspecte,
c’est cela la fraternité ! Nous
avons une idée autrement différente de la solidarité ! (Et alors, la liberté et
égalité, c’est pour quand ?)
Pourquoi ne pas inciter à devenir bénévoles
d’associations culturelles, sociales, sportives ou caritatives ? Pourquoi ne
pas éveiller le sens civique en appelant à se syndiquer, à militer dans des
partis politiques ou des ONG ? Là, ce serait intéressant !
Non ce n’est pas une politique de solidarité. C’est
une politique qui exacerbe la peur de l’autre et le sentiment d’insécurité ! En
faisant croire que chacun est en danger, on
réveille les plus bas instincts, contraires à l’idée de communauté
politique ! La suspicion n’est pas
bonne pour le vivre-ensemble.
À renvoyer au Ministère de la Délation
Mais le plus grave est que cette atmosphère de délation peut mener à la constitution de milices privées spontanées, incontrôlables, comme
elles se développent déjà dans certains pays européens (Grèce, Russie). Et
pour que la justice devienne vengeance et lynchage arbitraire, il n’y a qu’un
pas ! Dans le Bas-Rhin, les préfets se sont heurtés à la réticence des
habitants, qui se rappellent les sombres heures de notre histoire.
Vidéo-surveillance, armement lourd de la police
qui n’a qu’une fonction d’intervention, voisins vigilants… autrement dit surveillance, répression, délation voilà la
société qu’on nous prépare sous couvert de solidarité !
Ces thèmes et ces formules de l’extrême droite
disloquent notre pacte républicain et social et génèrent la discorde dans la
cité !
Autrement dit, il faut choisir entre liberté et
sécurité alors qu’il n’y a pas si longtemps on défilait pour la liberté
d’expression en se proclamant « je suis Charlie » ???
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