vendredi 6 décembre 2013

Faim

« Le bonheur n’est pas une question d’argent » nous affirme un lecteur de La Voix du Nord aujourd’hui quoique…

 « J’ai faim. Pas une petite fringale qui vous creuse le ventre en fin d’après-midi ou vous donne envie d’un carré de chocolat devant le film du soir. Non, j’ai une faim qui dure depuis plusieurs semaines. Ce sentiment m’étreint, lancinant, laminant. Pourtant je ne rate pas un repas. Mais ceux-ci ne revêtent désormais aucun plaisir et sont juste nutritifs. Je me dis que je devrais déjà me sentir heureux d’avoir à manger chaque jour, que certains n’ont pas cette chance. Qui sait si je ne serai pas l’un des leur prochainement ? Pas de plaisir, pas d’envie, les placards sont vides comme mon compte bancaire et lorsque s’ouvre la porte du réfrigérateur, c’est un désert froid qui s’ouvre devant moi. Un morceau de fromage entamé dispute la place à un reste de pâtes et une canette de bière. Rien, à manger. J’ai faim. Il serait nécessaire de réapprovisionner les réserves de nourriture. Ce serait pourtant facile : crédit, paiement en chèque débité le mois suivant, utilisation du découvert bancaire… Mais la morale m’interdit de dépenser pour le quotidien l’argent que je n’ai pas, alors j’attends le début du mois en serrant l’estomac.

J’ai faim. Loyer, eau, gaz, électricité, impôts, alimentation, transport… les euros s’échappent, emportés par des courants d’air, qui se font plus nombreux et plus puissants. Pris dans la tourmente de ce vent de factures, je ne trouve plus le repos.

Les journées de travail s’alourdissent, accroissent la fatigue, mais les chiffres de ma fiche de paie sont toujours les mêmes
.
J’ai faim et j’ai peur. Peur de voir le sourire de mes enfants leur tomber du visage sous le coup du manque. Alors pour conjurer le sort, je les comble de joie et d’attention pour leur remplir le cœur de ce qui  est gratuit, et tellement indispensable : l’amour.

Un jour, peut-être pas si éloigné, nous serons beaucoup plus nombreux à avoir faim, jusqu’à ne plus savoir contenter les besoins essentiels de nos enfants. Les dirigeants politiques prendront alors certainement, la mesure du danger qui les guette, et qui j’espère les fera réagir, humainement et de manière altruiste. »

C’était le courrier poignant  d’un autre lecteur en début de semaine, courrier qui ne peut laisser personne indifférent.



« La faim continue à s’étendre dans le monde » dit-on mais elle s’étend d’abord autour de nous et nous feignons ne pas la voir. 

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